Les femmes et les métiers spécialisés

Part Deux

Par Expert Monster

Par: Thomas Watt
Contributeur de Monster

Les métiers spécialisés ont quelque chose de spécial : ils transforment la vie des gens.

Dans mon premier article sur le sujet, j’ai abordé de façon plus générale les perspectives très intéressantes réservées aux femmes qui souhaitent faire carrière dans l’industrie de la construction. Ce deuxième article est plus spécifique et relate les entrevues que j’ai eues avec deux femmes qui ont relevé le défi passionnant de faire un métier spécialisé.

L’un de mes collègues m’a suggéré de rencontrer sa fille, Emily, qui a fait ses débuts comme ferblantière grâce à son papa. Du haut de ses 158 cm et à tout juste 45 kilos, Emily, surnommée « Super-Souris » par la famille et les amis, n’est pas ce qu’on pourrait appeler un travailleur typique de la construction.

« J’aime surprendre les gens », lâche-t-elle de son ton saccadé.

Je parle avec Emily au téléphone pendant que James, son fils de trois ans, essaie de se faire entendre sur l’autre ligne. Je lui demande si elle a trouvé difficile d’être une femme dans les métiers spécialisés.

Emily de répondre : « Il faut s’imaginer qu’on est un autre gars de l’équipe, même si ma présence sur les sites ne passe pas inaperçue. Mais mes équipiers m’ont traitée comme une des leurs et ont pris soin de moi. »

Maintenant âgée de 24 ans, Emily a commencé son métier de ferblantière à 16 ans. C’était une décrocheuse du secondaire qui ne savait pas trop quoi faire. Puis un jour, ne voulant pas être en reste, elle a demandé à son père si elle pouvait travailler avec son frère Andrew. Il refusa d’abord, prétextant qu’elle était trop petite, mais lorsque sa femme lui a rappelé qu’Emily avait soulevé, la veille, à la maison, un piano de 180 kilos à elle seule, son père acquiesça finalement. Le reste appartient à l’histoire.

Mais elle a trimé vraiment dur.

« Là où les autres gars consacraient 50 % de leurs énergies à faire leur travail, Emily en investissait 85 %. Elle avait les mains couvertes d’ampoules, mais elle ne s’est jamais plainte et se contentait de pleurer après son quart de travail, de retour à la maison », déclare fièrement son père.

J’ai demandé à Emily si elle a dû travailler plus fort parce qu’elle était une fille dans l’industrie de la construction.

« C’est certain, il fallait bien suivre le rythme. Les métiers spécialisés ne conviennent pas à tous, mais ça me manque tout ça, mes collègues, la satisfaction du travail bien fait. »

Au cours de ses huit ans comme ferblantière, Emily a travaillé pour deux ateliers. Elle a touché à tout : des bordures de toit et soffites aux ferrures et autres pièces métalliques élaborées. Je lui ai demandé si elle recommandait aux femmes de s’orienter vers les métiers spécialisés. « Absolument! », a-t-elle rétorqué, avant d’ajouter qu’elle n’avait jamais rencontré une autre femme dans son domaine.

Mais pour Emily, ce n’est pas vraiment une question de sexe, car bien des hommes n’y arriveraient pas non plus. Ça se résume à ceci : si vous aimez travailler de vos mains et êtes naturellement habile, les métiers spécialisés constituent un domaine formidable, pour les hommes comme pour les femmes.

Dans le cas d’Emily, les statistiques ne mentent pas en ce qui concerne les femmes qui font un métier spécialisé : elle a beaucoup gagné en confiance et en caractère, sans compter qu’elle gagnait très bien sa vie pour une jeune personne.

L’autre femme que j’ai rencontrée avait une histoire similaire.

Née à Saint-Lambert, au Québec, Isabelle Steenhill, 38 ans, a songé à fréquenter l’école de métiers après avoir vu plusieurs de ses amis obtenir un emploi spécialisé sans la moindre expérience, pour ensuite apprendre sur le tas.

Mais à son grand désarroi, quels que furent les efforts déployés, elle ne put décrocher un poste comme le leur.

Consciente que c’était parce qu’elle était une femme sans aptitudes, elle décida de remettre les pendules à l’heure et s’inscrivit dans une excellente école de métiers de Montréal, pour se spécialiser en ébénisterie.

Et Izo (pour les amis) excellait dans sa nouvelle vocation, mais, comme elle le raconte :

« J’adorais cette école. Les enseignants étaient incroyables et j’apprenais tout ce que j’avais besoin de savoir et plus encore. »

Pendant des années, ses amis l’ont taquinée en l’appelant la Martha Stewart des punks, faisant référence à sa participation à des spectacles de musique punk et à son penchant pour l’artisanat et le jardinage. Dorénavant, elle mettrait à profit ses talents naturels en menant une carrière lucrative. En effet, le métier d’ébéniste peut rapporter n’importe quoi entre 20 000 et 100 000 $ par année!

Lorsque je lui ai demandé si le fait d’être une femme apprenant un métier spécialisé était une source de discrimination, elle répondit :

« C’est sûr que les gars qui étudiaient avec moi avaient des préjugés, mais ce n’était absolument pas le cas des enseignants. Je pense qu’au fil des ans, les enseignants ont perçu le potentiel des femmes dans les métiers spécialisés et n’avaient donc aucun parti pris. »

Tout comme Emily, Izo est une petite femme, mais comme elle l’explique, dès qu’elle est devenue « qualifiée », les gens l’ont prise au sérieux. Elle manie très bien les outils et est très à l’aise dans un atelier, ce qui dissipe tous les doutes qu’on pourrait avoir sur elle parce qu’elle est une femme.

L’histoire d’Izo est inspirante. Elle a cerné ses limites mais ne s’est pas découragée et a plutôt cherché une solution pour les surmonter. Mission accomplie! Elle a obtenu son diplôme de l’école de métiers haut la main, s’est installée sur la superbe côte Ouest et rêve de diriger sa propre ébénisterie où elle se spécialiserait dans la confection de meubles à partir de bois flotté.

Lorsque je lui demande ce qu’elle préfère de son travail, elle sourit : « Ce qui est le plus valorisant en ébénisterie, c’est d’être dans l’atelier et de créer des pièces qui feront le bonheur des gens pendant de nombreuses années. Chaque pièce terminée procure une satisfaction inégalable! Et il y a aussi la dimension artistique qui m’inspire au plus haut point. »

Alors voilà, vous venez d’en apprendre plus sur deux femmes brillantes, solides et indépendantes, qui non seulement ont un métier spécialisé, mais y excellent. Et si la lecture de cet article vous porte à croire que les métiers spécialisés ne conviennent pas à tout le monde, dites-vous bien qu’homme ou femme, si vous n’avez pas peur de travailler fort, si vous êtes un esprit libre qui aime se servir de sa tête et de ses mains et ainsi gagner décemment sa vie, alors les métiers spécialisés sont une avenue très intéressante pour vous.

Qui sait si vous ne dénicherez pas l’emploi qui transformera votre vie!